La neige recouvrait lentement les rues de Paris de son blanc manteau. Bientôt, les trottoirs seraient complètement invisibles. Déjà les pavés commençaient à disparaitre sous les flocons. Il faisait froid en ce trente et un décembre, et les avenues de l’étoile, bien que la veille du nouvel an, étaient désertes. Il devait bien faire moins vingt degrés, la tempête de neige avait surpris tous les habitants. Personne n’avait connu un tel phénomène depuis plus de cent ans.
Les vitrines des magasins restaient allumées, mais pas une âme n’eut le courage de venir les admirer. Paris s’était transformée en véritable ville fantôme, le seul bruit pouvant se faire entendre était celui du vent sifflant dans les branches des sapins encore décorés de boules de noël.
Les voitures, à l’arrêt car bloquée par la glace qui s’entassait sous leurs roues, gelaient sagement dans les rues, elles aussi abandonnées de leur propriétaire, attendant qu’un quelconque passant viennent faire chauffer leur moteur rouillé par l’humidité. Leur carrosserie, qu’elle soit rouge, noire, jaune ou violette, blanchissait peu à peu.
Soudain, une ombre parut, seule tache dans ce paysage immaculé désormais. Un homme, ou plutôt un jeune garçon, affrontait courageusement le froid glacial. Son visage était recouvert d’un large capuchon pour le protéger des assauts du vent. Un long manteau rouge descendait jusqu’à ses genoux, et il portait, dans ses main cachées par d’épais gants, une boite, emballée dans un paquet cadeau.
Le bruit de ses pas résonnait dans l’avenue vide. Il s’arrêta au feu rouge, regardant des deux côtés de la rue ayant failli se faire écraser sur le chemin de l’allée, mais cette fois ci, tous les véhicules s’étaient endormis. Rassuré, il commença à courir pour échapper au froid. Une plaque de verglas se présenta à lui, et il ne put l’éviter. Cependant, il ne lâcha pas son présent dans sa chute, comme si sa vie en dépendait. Il se releva aussi vite qu’il était tombé, secoua la neige qui s’était collée à lui, puis reparti en direction du point le plus élevé de Paris, la bute de Montmartre.
-Saleté de tempête de neige ; jura-t-il dans sa course, à cause de ça, je vais être en retard et Angéla ne me le pardonnera pas…Dit-il en levant les yeux vers la bute. Avec un peu de chance, les autres seront eux aussi bloqués…
A une autre époque, plus précisément 5000 ans auparavant, dans un petit coin de désert où coulait un fleuve, gelé pour la première fois, se dressait fièrement une citadelle de pierre entourée de hauts remparts, mieux connu sous le nom d’Héliopolis, la cité du soleil. Cependant, le soleil se faisait rare en ce moment. D’épais nuages recouvraient le ciel, et une étrange pluie blanche et collante tombait sur les fortifications.
-Viens voir ça Hélios ; dit une voix féminine du haut des remparts.
Un homme sortit du fort. Il portait une armure dorée, entourée d’une belle cape pourpre de velours. Une couronne ornée de joyaux scintillait sous ce ciel étrange. Il ne semblait pas avoir dormi depuis plusieurs jours, ses cernes sous ses yeux en témoignaient. Une barbe de quelques jours lui poussait, tandis que ses cheveux blonds comme le soleil avaient perdus tout leur éclat.
-Qu’y a-t-il Célestia ; demanda l’homme d’une voix ensommeillée.
La jeune femme se tourna vers lui. Dans son regard se lisait l’émerveillement mais aussi l’étonnement. Ses longs cheveux bruns cachaient une partie de son visage et tombaient sur ses beaux yeux marron et volaient au vent. Elle lui fit signe d’approcher.
-Regarde….Dit-elle en désignant la pluie gelée.
L’homme s’approcha, prudent puis fronça les sourcils à la vue de cet étrange phénomène climatique.
-Qu’est-ce…Qu’est-ce cela Célestia ? Demanda-t-il inquiet.
-Je n’en ai pas la moindre idée Hélios…Mais c’est magnifique tu ne trouves pas ?
-Magnifique ? Dit-il sceptique.
Il s’approcha du bord des remparts, en faisant attention de ne pas glisser sur ce tapis de glace. Ce qu’il vit l’émerveilla. C’était la première fois qu’il voyait son royaume d’Héliopolis autrement que baigné par les rayons brulants du soleil du désert. Le sable avait pris une couleur blanche et immaculée. Partout les dunes, autrefois si arides, se retrouvaient constellées de minuscules flocons brillants et éblouissants. Au pied des murailles, une foule s’était assemblée tout comme leur roi, pour admirer cette bizarrerie. Le fleuve, habituellement si agité et turbulent, semblait s’être figé sous l’action du froid. L’eau s’était cristallisée en une épaisse couche translucide et scintillante. Des enfants s’amusaient à marcher dessus, puis tombaient et étaient rattrapés par leurs parents affolés. Hélios secoua la tête pour être sûr de ne pas rêver, mais ce qui se tenait devant lui était bien la réalité.
-C’est si beau…ce blanc si pur…murmura-t-il.
-Oui, ce n’est pas tous les jours qu’Héliopolis ressemble à ça. Nous devrions le fêter tu ne penses pas ?
-Le fêter ? En pleine guerre ? S’exclama Hélios surpris par une proposition si soudaine.
-Oui, les habitants ont bien besoin d’un peu de joie tu ne penses pas ? Surtout avec ce qui se prépare…Dit Célestia en baissant les yeux.
-Tu as peut-être raison après tout, même moi je ne serai pas contre…Je vais dire à Luna de prévenir tout le monde, ce soir ce jour unique sera célébré dans tout le royaume!
Le téléphérique était en panne lui aussi, les fils électriques avaient gelés, il allait devoir monter à pieds. Le jeune garçon regarda l’heure sur la pendule de la gare : 17 heures. Il n’avait que trente minutes de retard. Si seulement les transports en communs avaient bien voulu fonctionner, mais Paris était complètement prise au dépourvu par cette tempête si soudaine. Il monta les marches couvertes de neige désormais en prenant soin de son précieux paquet. S’il tombait, il serait fichu. Il dérapa, mais pu se rattraper à la rampe de justesse, puis continua sa route en grelotant. Ce n’était vraiment pas le bon jour pour monter là-haut.
La neige ne s’arrêtait plus de tomber, toujours plus fort, toujours plus vite. Il avançait tant bien que mal, il ne pouvait plus faire demi-tour désormais, il était trop proche de son but. Il remonta dans les rues enneigées et pentues de Montmartre sans croiser personne. Toutes les maisons autour de lui avaient les volets clos et de faibles lumières sortaient des foyers. L’ambiance n’était pas du tout à la fête.
Enfin il arriva sur la fameuse place carrée, d’habitude si animée, mais aujourd’hui si silencieuse. Le jeune garçon se dirigea vers la maison désormais bien connue du professeur Wheeler et de sa famille puis sonna. Personne ne répondit, mais il attendit tout de même à la porte. Il était gelé, transit de froid, la neige commençait à s’accumuler sur son beau manteau pourpre.
-Ils ont déjà dû partir sans moi ; pensa-t-il. Je suis arrivé trop tard.
Il allait tourner les talons quand il entendit un bruit de pas de quelqu’un descendant les escaliers à toute vitesse. La porte s’ouvrit brusquement, et il se retrouva nez à nez avec une jeune fille blonde aux yeux azur. Elle portait une légère robe de satin assez peu adaptée à la saison, ainsi qu’une paire de ballerines blanches. Ses cheveux étaient coiffés comme tous les jours, bien qu’un serre-tête soit venu embellir sa chevelure d’or déjà presque parfaite. Le garçon rougit en la voyant ainsi.
-Te voilà enfin Drago ! S’écria-t-elle. Nous pensions que tu ne viendrais pas !
-Je suis vraiment désolé Angéla; s’excusa le garçon embarrassé, mais j’ai été surpris par la tempête…
-L’essentiel c’est que tu sois arrivé sain et sauf ; répondit Angéla avec un sourire. Dépêche-toi, le professeur Wheeler a tenu à ce qu’on ouvre les cadeaux en t’attendant, heureusement que tu es arrivé juste à temps.
Drago entra dans la maison et fut tout de suite revigoré. Il faisait la température idéale à l’intérieur. Il déposa son manteau couvert de neige ainsi que ses gants à l’entrée puis suivit Angéla dans le salon. Tout le monde était déjà arrivé, Darksky, Laura, June, Marie, même Hélios était là…
-Ah Drago, je suis content de te voir ; dit le professeur en venant lui serrer la main. J’espère que cette tempête ne t’a pas trop gêné pour venir ici ?
-Non, pas du tout professeur ; mentit-il pour ne pas l’offenser.
-Je suis heureux de te revoir Drago, je n’avais pas eu le temps de te remercier pour ce que tu avais fait pour moi ce jour-là ; dit Hélios.
Drago fut surpris par les habits que portait Hélios. Il avait échangé son armure dorée contre un élégant costume noir, sa cape s’était changée en nœud papillon, tandis que sa couronne était remplacée par un chapeau haut de forme. Il était méconnaissable, on aurait presque dit quelqu’un de normal, à ceci près qu’une personne ordinaire ne portait plus de chapeau haut de forme depuis les années 1950…
-Ce n’était rien, vraiment, répondit Drago un peu gêné.
La soirée se prolongea ainsi, chacun racontant ses dernières aventures aux autres, la bonne humeur était au rendez-vous malgré le froid mordant et la tempête de neige à l’extérieur.
-N’oubliez pas ; dit soudain June en plein milieu d’un des récits de son père sur le grand léviathan, ce soir à 21 heures exactement nous devrons être sur la bute en face de la basilique si nous voulons voir quelque chose.
-Tu es sûre qu’il aura lieu ? Demanda Laura en regardant par la fenêtre. Personne ne voudra sortir par un temps pareil.
-Oui, il aura lieu, confirma Darksky, il a lieu chaque année qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il grêle…
-Sauf que cette fois-ci il neige ; ironisa Marie.
Tout le monde éclata de rire, même Darksky. Arriva enfin l’heure de l’ouverture des cadeaux. Ils n’avaient pas pu se voir pour noël, et avaient par conséquent décidé de fêter noël et le nouvel an le même jour.
-Luna ! Appela Hélios en descendant les marches d’un sombre escalier en courant.
Il s’enfonçait toujours plus sous terre. L’escalier en colimaçon ne semblait jamais de terminer, s’enroulant sur lui-même à l’infini. Il était faiblement éclairé par quelques torches en fin de vie mais l’obscurité restait reine dans cet endroit, et à cause de cela, Hélios se prit les pieds dans sa propre cape et fini sa descente en roulant dans les marches.
Lorsqu’il se releva couvert de bleus, Hélios se trouvait dans une grande pièce souterraine, circulaire, au milieu de laquelle brûlait un feu ardent. Une femme portant une logue toge noire surmontée d’une capuche qui recouvrait entièrement son visage était debout, seule, à contempler la source de chaleur. Elle ne semblait pas avoir entendu son roi arriver d’une manière assez peu conventionnelle.
-Luna, est-ce que tu sais ce qu’il se passe dehors ! Dit Hélios avec tant d’entrain que sa voix résonna sur la pierre.
-Tu es venu m’annoncer que nous avons perdu encore une bataille ? Dit la jeune femme, les yeux dans le vide.
-Mais…mais pas du tout ! J’étais venu te demander de faire passer un message à tous les habitants…
- Quel sorte de message? Celui qui annonce la fin de notre royaume ? Dit Luna tristement.
-Mais tu vas arrêter de dramatiser à la fin ! Oui, c’est vrai, notre royaume n’est plus aussi prospère qu’avant à cause de la guerre, mais c’est justement pour cela qu’il nous faut quelque chose pour remonter le moral de tous, quelque chose qui marquera les esprits pour les siècles à venir !
-Et à quoi penses-tu mon frère ?
-Une fête, une fête grandiose, où tout le monde, qu’il soit riche ou pauvre, homme ou femme, enfant ou adulte, puisse vivre au moins une journée dans l’égalité et la joie du partage…
La jeune femme se raidit en entendant cela. Elle tourna la tête vers son frère, et il put la voir distinctement lorsqu’elle enleva sa capuche. Elle était épuisé, peut-être même encore plus que lui. Cela devait bientôt faire cinq jours qu’elle n’était pas sortie de l’autel.
-Et en quel honneur serait cette fête ? Demanda-t-elle soudainement intéressée par la proposition.
-Regarde par toi-même ; dit Hélios en pointant le feu.
Luna se dirigea vers son brasier, puis, après quelques incantations, une image se forma dans les flammes.
-Vois-tu Luna ? C’est magnifique n’est-ce pas ?
Les yeux de Luna s’étaient constellés d’étoiles devant ce spectacle féerique. Toute la fatigue accumulée ces derniers jours s’évapora d’un seul coup. Ce paysage blanc lui avait fait totalement oublié les horreurs de la guerre qui se tenait en ce moment même. La pureté de la glace sur le fleuve avait un effet si apaisant sur celui-ci et sur elle-même. Le froid glacial de cet hiver était une chose qu’aucun habitant ne connaissait à Héliopolis.
-C’est…il n’y a pas de mot pour décrire cela…
-Tu comprends enfin Luna ? Ce monde aura beau subir des guerres impitoyables et meurtrières, ce paysage nous rappelle à tous à quel point tout cela est futile face à la beauté de la nature. Le cycle même de la vie, elle nait au printemps, puis meurt en hiver, nous ne pouvons aller à l’encontre de cela. C’est pour cette raison que je veux organiser cette fête, pour nous rappeler à quel point les moments de bonheurs nous sont uniques et précieux comme ce jour, mais aussi fragiles et brefs…
-Hélios…Bien, tu as gagné, je vais faire passer ton annonce, mais tu as intérêt à préparer quelque chose de grandiose ce soir ; dit Luna en fermant les yeux.
-Je ne te décevrai pas, on parlera encore de cette fête pendant des millénaires, tu vas voir !
Drago sortit un pull de laine de l’un des paquets.
-Je pensais que ça pourrait toujours t’être utile ; dit Mai. On ne sait jamais ce que l’on peut attraper avec ce temps.
-Merci beaucoup Mai, ça me fait très plaisir ; répondit Drago.
Laura eut droit à un pendentif en forme d’aigle noir de la part de Darksky, ce qui eut l’air de lui faire très plaisir, tellement qu’elle se jeta dans ses bras. Le professeur quant à lui obtint un vieux livre de la part de sa fille. Il parlait de mythes et légendes démenties récemment.
-Je me suis dit que ça serait marrant comme cadeau, toi qui aime tant raconter des histoires à dormir debout, tu vas être servi avec ce bouquin.
Hélios reçu une pierre précieuse verte émeraude de la part d’Angéla. Elle était vraiment magnifique avec ses reflets bleus, et sa taille en faisait un parfait pendentif.
-Ne vous inquiétez pas, ce n’est pas de l’orichalque encore une fois.
-J’espère bien !
Marie donna à Darksky un blouson en cuir noir, avec des plumes sur les manches, comme les oiseaux de proie.
-Comme ça, on ne se demandera plus d’où te viens ce surnom ; dit-elle joyeusement.
Drago sentait son tour arriver, mais il était mal à l’aise. Et si son cadeau ne convenait pas ? Et si les autres pensaient qu’il en faisait trop ? Après tout, ce n’était pas n’importe quoi qui était emballé dans cette boîte.
-Drago ; dit Hélios en le tirant de ses pensées, qu’est-ce que tu nous as apporté de beau ?
-Eh bien à vrai dire…je ne suis pas sûr que ça plaise, mais j’ai tout de même apporté un petit truc pour Angéla ; bafouilla-t-il.
Lorsqu’il dit cela, Laura donna un coup de coude à Darksky, accompagné d’un sourire malicieux, mais celui-ci ne saisit pas tout de suite la motivation de cet acte, tandis que Marie, elle, comprit tout de suite et ne put s’empêcher de rire.
-Pour…pour moi ? S’étonna Angéla.
Drago lui tendit le petit paquet emballé dans un élégant papier rouge. Celle-ci s’empressa de l’ouvrir. Une fois l’emballage déchiré, tous purent voir une petite boite blanche, carrée, et légèrement arrondie sur le dessus. Elle était fermée par un fin crochet argenté. Angéla souleva le couvercle délicatement. A l’intérieur, sur un coussin de velours rouge, était posé un magnifique collier, argenté comme la boite qui le contenait. Au bout était accroché une paire d’aile d’ange, aussi blanches que la neige qui tombait au dehors. Angéla s’empressa de le passer autour de son cou. Ce bijou lui allait très bien.
-Merci beaucoup Drago, c’est gentil d’avoir pensé à moi…
Elle s’approcha de lui et l’embrassa pour le remercier. Le pauvre Drago, déjà embarrassé, devint aussi rouge que son coussin de velours.
Hélios se pencha alors sur le présent de Drago et hoqueta de surprise en voyant l’objet.
-Impossible…Cet objet…Commença-t-il avant d’être interrompu par Marie.
-Vous avez vu l’heure ! S’écria-t-elle. Déjà 20 heures trente ! Si ça continue, on ne verra absolument rien du spectacle !
-Oui, parfait ! Dit Hélios au chef des ouvriers. C’est exactement comme ça que je voyais la salle. Dans combien de temps le banquet sera-t-il prêt ? Demanda-t-il aux assistants en cuisine.
-Dans environ une heure seigneur Hélios. Mais nourrir une aussi grande population ne sera pas chose aisée, nous risquons de manquer de nourriture dans les jours à venir…
-Ce n’est pas grave, certains manquent de nourriture tous les jours. Nous priver pendant un repas ne nous fera pas de mal.
Il congédia ensuite toute l’équipe puis se retourna vers la grande salle de réception. Oui, tout était parfait, vraiment. Les murs d’habitude si nus, s’étaient ornés de belles tapisseries rouges, réservées aux jours de fêtes comme le couronnement d’un nouveau roi. Elles étaient d’un matériau extrêmement rare, et introuvable à Héliopolis. On disait qu’elles avaient été données en cadeau au précédent souverain par le pharaon Atem en personne à la fin de la guerre. Personne ne savait exactement avec quoi elles étaient faite, mais une chose était sûre : personne n’avait jamais réussi à les reproduire.
Au sol, un immense tapis doré avait été posé, tandis qu’au plafond brillait un lustre de cristal, sur lequel se reflétait l’éclat des bougies qui le composaient. Au milieu était dressé une longue table surmontée d’une nappe de soie fine, sur laquelle étaient disposés de nombreux plats et assiettes pour pouvoir accueillir comme il se devait les invités. Du raisin débordait de saladiers en or, des coupes de vin rouge étaient pleines à chacune des places. Il y avait sur les côtés des chaises longues pour faciliter la conversation, tandis qu’à l’entrée étaient placés des gardes chargés de prendre les affaires un peu trop encombrantes et de remettre aux habitants une belle toge qui devait leur tenir chaud. Au fond de la pièce, juste à côté du trône d’Hélios, un grand arbre avait été planté. Mais ce n’était pas un arbre ordinaire, il possédait des aiguilles et non des feuilles et semblait s’épanouir dans le froid. C’était un des courtisans qui l’avait amené ici pour s’en débarrasser, mais Hélios s’en fichait, il le trouvait joli et avait même décidé de le décorer lui-même avec des vieilleries qui trainaient dans les sous-sols du château. Le résultat était plutôt satisfaisant, mais le plus beau restait incontestablement l’étoile accrochée à son sommet. Juste en dessous étaient disposés les présents faits par des hommes de la cours à leur seigneur mais dont il n’avait jamais eu l’utilité. Autant les donner aux plus démunis. Mais il manquait quelque chose pour qu’Hélios soit pleinement satisfait de lui.
Un joaillier passa alors en vitesse devant son seigneur qui l’interpela au passage.
-Toi là-bas !
-Oui seigneur Hélios, que puis-je faire pour vous ? Dit-il avec une révérence.
-Voilà, tu es le joaillier le plus connu du royaume, pour ne pas dire le seul, et j’aurai une faveur à te demander…
-Je vous écoute ; dit-il soudain très intrigué par la requête.
-Je voudrai faire plaisir à tout le monde aujourd’hui, mais plus particulièrement à Célestia si tu vois ce que je veux dire…
-Développez s’il-vous-plait.
-Je voudrais quelque chose qui marque les esprits, mais pas seulement celui de Célestia, celui de tout le royaume…
-Je crois que je sais ce qu’il nous faut. Mais ça ne sera pas facile à préparer, nous n’avons encore jamais utilisé ce genre d’artifice.
-Mais tu penses que c’est faisable ?
-Bien sûr, rien ne m’est impossible ; répondit-il fièrement. En attendant que nous soyons prêt, donnez ceci à la reine, elle sera très contente je pense.
Le joailler sortit de sa poche un petit collier argenté, terminé avec une paire d’aile angélique, blanches, travaillées avec tant de soin qu’elles semblaient réelles et prêtes à prendre leur envol.
-Tu es sûr de vouloir te séparer d’un tel chef d’œuvre ?
-Oui, comme vous l’avez dit, aujourd’hui est un jour de fête, et je voudrai aussi vous remercier pour ce que vous avez fait avec ce royaume.
Il repartit vers les jardins royaux, entrainant avec lui quelques hommes de confiance. Hélios resta planté au milieu de la salle, à contempler son magnifique pendentif.
-Que nous caches-tu Hélios ?
-C…Célestia ! Dit-il en cachant précipitamment le présent. Je…Je regardais la finalisation de ton projet, rien de plus.
- Détends-toi, cela ne peut que bien se passer.
-Oui, tu dois avoir raison…
Hélios serra le collier contre lui. Il ne pouvait pas résister au charme de Célestia, elle l’avait toujours accompagné dans les moments de joies comme de peine. Depuis qu’ils étaient enfants, ils ne s’étaient jamais séparés. C’était le jour idéal pour la remercier, ce qu’il n’avait jamais eu le temps de faire auparavant.
Drago enfila ses gants et son manteau pour affronter à nouveau la tempête au dehors. Cependant, lorsqu’il franchit le seuil de la porte, le vent glacial qui l’avait amené ici ne soufflait plus aussi violemment qu’avant, la neige tombait désormais plus lentement, plus calmement.
-Bonne nouvelle ; dit June aux autres, nous ne risquons pas de mourir ensevelis sous la neige !
-Génial, nous allons simplement mourir de froid ; grommela Darksky assez fort pour que tout le monde l’entende.
Une fois tout le monde à l’extérieur, le professeur boucla la maison à clé puis toute la bande se mis en marche. Le goudron était désormais complètement couvert d’une épaisse couche de poudreuse de six ou sept centimètres dans laquelle chaque pas s’enfonçait avec un crissement.
La vie semblait être revenue dans Paris, quelques rares téméraires s’étaient décidés à sortir de chez eux pour admirer le spectacle qui allait s’offrir à eux dans quelques instant. Drago marchait près de Laura, tandis que Le professeur était lancé dans une grande conversation avec Hélios sur les mystères du passé. Angéla n’était pas loin, mais Drago n’osait plus lui adresser la parole. Il ne pouvait sortir l’image du baiser de sa tête.
-Tu trouveras bien le courage de lui dire un jour ; lui dit Laura sur un ton neutre.
-Qu…qu’est-ce que tu veux dire ? Demanda Drago en rougissant.
-Moi ? Pas grand-chose, juste qu’il ne faut pas que tu laisses passer l’occasion.
-Quelle occasion ?
-Tu le fais exprès ma parole ? Dit Laura en écarquillant les yeux. Tu n’as toujours pas remarqué la manière dont elle te regarde ?
-Pas vraiment mais…
-Mais quel boulet ! Elle t’aime, et tu l’aimes aussi, ça se voit dans vos yeux !
-Tu le penses vraiment ?
Drago tourna la tête vers Angéla. Depuis qu’il la connaissait, sa vie avait changé. Il n’avait jamais ressenti cette émotion avant. Quand Angéla était loin de lui, il ne pouvait s’empêcher de penser à elle, et lorsqu’ils étaient ensembles, il se sentait protégé, une sorte de chaleur émanait de son cœur. Il repensa à leur rencontre. Il s’en souvenait comme si c’était hier. Elle lui avait sauvé la vie ce jour-là. Mais par la suite, il n’avait jamais réussi à lui rendre la pareille, même dans la citadelle.
Ils arrivèrent enfin au pied de la basilique. Elle était magnifique sous ce paysage glacé. Elle ressemblait de loin à un mirage dans un désert de blanc. Les cloches sonnèrent 21 heures. Du monde était déjà rassemblé. Enfin, comparé à la foule habituelle des jours ensoleillés, il n’y avait personne.
Le petit groupe descendit les marches qui menaient à la pelouse, invisible sous la neige. Les arbres autour étaient figés, pris dans la glace qui s’accrochait à leurs branches nues. Ils prirent place chacun de leur côté, de sorte à voir le mieux possible la tour Eiffel d’où allait être tiré le feu d’artifice du nouvel an. Les adultes, Hélios, Mai et le professeur allèrent se placer sous un arbre en haut de la colline tandis que les autres s’installèrent sur l’herbe gelée, June et Marie sur la gauche, Drago et Angéla sur les marches au milieu. Darksky allait lui aussi s’asseoir avec eux lorsque Laura l’attrapa par le bras.
-Attends un peu toi, allons plutôt nous installer là-bas ; dit-elle en désignant le coin où se trouvaient June et Marie.
-Pourquoi ? On est très bien ici aussi non ?
Elle lui décocha un regard si noir qu’il n’osa refuser et la suivit, non sans protester. Laura se retourna vers Drago et lui lança un clin d’œil. Il sut tout de suite pourquoi elle avait été aussi dure avec Darksky, mais il aurait vraiment préféré ne pas être seul à ce moment-là.
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musique d'anbiance, à couper à la fin de la scène bien évidemment et à reprendre au milieu de la prochaine partie^^
https://www.youtube.com/watch?v=DTGwKTegpi8—————————————————————————————————————————————————-
Il se tourna vers Angéla, elle regardait fixement le ciel noir et parsemé de nuages. Il se remémora la fois où ils étaient dans le désert, il avait pu parler seul à seul avec Angéla ce jour-là, mais depuis, les choses avaient changé entre eux, surtout pour lui.
Elle était encore plus belle ce soir-là, la neige sur ses cheveux faisait ressortir leur éclat dans la nuit. Ceux-ci ondulaient élégamment au gré du vent, leur mouvement d’aller et retour permanant les faisaient scintiller comme s’ils étaient parsemés de poussière d’étoile. Ses joues étaient roses à cause du froid, elle portait une légère veste noire qui couvrait à peine ses épaules frêles. Angéla avait vraiment l’air d’un ange tout droit sorti du paradis, la neige décrivant comme des ailes derrière elle.
-Que c’est beau ! S’exclama-t-elle soudain.
Drago leva la tête, intrigué par ce que pouvait contempler Angéla. La poudre blanche descendait lentement des nuages en petits flocons tourbillonnant. Mais ce n’était plus la tempête si désagréable, c’était un spectacle comme sorti d’un rêve.
Le feu d’artifice commença enfin, brisant le silence de la nuit. D’immenses fleurs colorées se rependaient dans le ciel, l’illuminant comme en plein jour.
-Merci Drago ; dit Angéla tout en tenant le pendentif dans sa main. Merci pour ce beau cadeau…
Il ne s’attendait vraiment pas à ça. Il tenta de répondre quelque chose d’intelligent mais rien ne sortit de sa bouche, et Angéla continua.
-Je crois que si je ne t’avais pas rencontré, je serais toujours aussi immature que je ne l’étais avant. Grâce à toi et aux autres, j’ai pu vivre des moments uniques, faire des choses que je n’aurai jamais eu le courage de faire en temps normal…
-Angéla…
Laura faisait de grands signes au loin sous les regards étonnés de June, Marie et Darksky. Drago ne pouvait l’entendre mais il devinait sans aucun mal ce qu’elle essayait de lui dire. Son cœur s’accéléra soudainement lorsqu’Angéla posa sa main sur la sienne sans le faire exprès.
-P…Pardon, s’excusa-t-elle, rouge de honte, ou bien de gêne.
-Non…ce n’est pas grave…
Elle grelotait. Sa veste par-dessus sa robe d’été n’était pas du tout assez chaude pour elle. Drago se rapprocha d’elle et lui mis son manteau sur les épaules.
-Non, je t’assure Drago, ce n’est pas la peine que tu prennes froid par ma faute.
-C’est toi qui va attraper froid si tu restes aussi peu couverte. Je n’en ai pas vraiment besoin en plus.
-Merci…
Elle se rapprocha un peu plus pour partager le manteau avec lui. Drago ne bougea pas, il ne savait vraiment plus quoi faire. Il regarda dans la direction de Laura mais celle-ci ne haussa les épaules comme pour lui dire qu’elle avait fait tout ce qu’elle pouvait. Il finit cependant par lui rendre son étreinte.
La présence d’Angéla à ses côtés suffisait à le rassurer et à lui faire oublier le froid mordant de la nuit tandis que le feu d’artifice devenait de plus en plus majestueux. Il savait au plus profond de lui que cette amitié était réelle et pure. Mais était-ce simplement de m’amitié ou bien plus que ça comme le pensait Laura ?
-Tu es pensif Drago, quelque chose ne va pas ? S’inquiéta-t-elle.
-Non, tout va pour le mieux Angéla. Tout est vraiment…parfait.
Elle posa tendrement sa tête sur son épaule. Au loin, la dernière fusée s’éteignait dans la nuit et le silence revenait peu à peu. Les passants commençaient déjà à partir, mais Drago et Angéla ne bougeaient pas, ils restaient sur la pelouse. Laura fit signe aux autres de ne pas aller les déranger, ce à quoi Drago répondit par un signe de tête pour la remercier. Il serait aussi bien resté là toute la nuit, juste pour avoir Angéla à ses côtés encore quelques minutes…
Les premiers invités franchirent la grande porte. Dehors, des milliers de personnes faisaient encore la queue pour entrer dans le palais sous l’invitation de leur souverain. Hélios observait la scène du haut des remparts. Tout cela allait bien trop lentement à son goût, et les derniers à entrer auraient sûrement eut le temps de prendre froid entre temps. Il fallait se dépêcher. Il descendit précipitamment les marches, manquant de glisser plusieurs fois, pour aller se poster lui-même à l’entrée. Quand ils le virent arriver, tous les gardes et tous les habitants s’agenouillèrent. Ce n’était vraiment pas le moment, il leur fit donc signe de se relever. Il allait vraiment falloir qu’il enlève cette stupide règle de révérence en sa présence, ça ne faisait que faire perdre du temps à tout le monde.
-Ce n’est pas le moment de faire des courbettes s’exclama-t-il. Aujourd’hui, nous sommes tous égaux, donc pas de seigneur Hélios, simplement Hélios.
Il regarda ceux qui étaient déjà entrés. Les riches du royaume comme par hasard. Il se mit alors en tête de faire avancer lui-même la file, de donner lui-même les manteaux et de prendre les affaires des autres. Les gardes le regardèrent étonnés par son attitude, mais il ne leur prêtait même pas un regard. Il était bien trop occupé à saluer tous les invités comme s’il les connaissait personnellement.
Il faisait cela avec tant de bonne volonté et y mettait tout son cœur, si bien que les gardes vinrent l’aider dans sa tâche. En une demi-heure à peine, tout le monde était à l’intérieur et haut chaud. Cependant, personne n’osait se servir tant qu’Hélios n’était pas là.
Celui-ci était encore à la porte, guettant l’arrivée d’éventuels retardataires. Il allait ordonner la fermeture des portes lorsqu’il entendit des bruits de pas venant de dehors.
-Attendez ! Dit-il en regardant au loin, je crois que nous avons un autre invité.
En effet, une petite fille était en train de courir dans la poudreuse pour échapper au froid. Elle ne devait pas avoir plus de douze ou treize ans et portait des haillons sur elle. Il n’y avait personne pour l’accompagner, pas un seul adulte à l’horizon ni d’enfant plus âgé. Soudain, elle glissa sur sa robe et s’effondra dans l’immensité gelée et tenta de se relever, mais la fatigue ou le manque de force l’en empêcha. Cela arracha un pincement au cœur d’Hélios qui se précipita à sa rencontre.
-Dites-leur qu’ils peuvent commencer sans moi, je ne serai pas long ! Dit-il en s’éloignant.
La neige entravait ses mouvements mais il ne pouvait pas laisser cette petite fille seule dans le froid, pas un jour pareil en plus ! Lorsqu’il arriva à sa hauteur, elle leva le nez vers lui, une lueur d’espoir dans les yeux.
-Ne t’inquiète pas ma petite ; dit-il d’un ton amical, je vais te sortir de là.
Il la prit alors dans ses bras. Elle était glacée et respirait à peine. Il n’y avait pas une minute à perdre, elle devait être ramenée au palais de toute urgence !
Hélios brava donc une seconde fois la tempête pour ramener sa protégée en sécurité. Une fois à l’intérieur, il évita la salle de réunion pour aller directement dans ses appartements privés, là où un feu brûlait encore. Il déposa la petite dans un fauteuil confortable, une couverture sur les épaule et lui apporta un peu d’eau.
-Merci beaucoup Seigneur Hélios ; dit la jeune fille avec difficulté.
-Ce n’était rien, je ne pouvais pas te laisser ainsi dans ce froid. Mais appelle moi simplement Hélios pour ce soir, c’est la fête après tout. Mais dis-moi, quel est ton nom ?
-Je m’appelle Cynthia ; répondit-elle.
-C’est très joli comme prénom. Et dis-moi, tes parents n’ont pas pu venir à la fête ou bien vous n’étiez pas au courant ?
Les yeux de Cynthia se voilèrent lorsqu’Hélios parla de sa famille.
-Ils…ils sont morts. Je ne les ai jamais vraiment connus à vrai dire…J’ai toujours du me débrouiller seule pour me nourrir, ainsi que mon meilleur ami…
Il ressentit alors de la pitié envers cette jeune fille. Il était passé par là lui aussi, il comprenait la douleur qu’elle pouvait ressentir chaque jour, le poids de la responsabilité de la survie d’un autre et la solitude qu’elle avait dû éprouver après leur mort. Il prit alors une décision qu’il n’aurait jamais prise en temps normal, mais cette jeune fille lui rappelait trop son propre passé pour fermer les yeux.
-Que dirais-tu de venir au palais de temps en temps ? Tu pourrais t’y plaire, j’en suis persuadé.
-Vraiment ? Vous feriez ça pour une inconnue comme moi ? Dit-elle surprise.
-Eh bien…oui, je ne peux pas te dire les raisons qui me poussent à te proposer une telle chose, mais si tu ne veux pas, je comprendrai…
-Si, bien sûr, c’est avec joie que j’accepte ! Répondit-elle avec entrain.
-Parfait. Et si nous allions rejoindre les autres ? Ils doivent s’impatienter de ne pas me voir.
Hélios et Cynthia sortirent de l’appartement et rejoignirent la salle des fêtes. Sur le chemin, ils croisèrent Luna apparemment mécontente.
-Te voilà enfin toi ! Dit-elle en s’adressant à Hélios, ça fait vingt minutes que tout le monde t’attend, tu n’as pas le droit de disparaitre ainsi !
Il ne put trouver d’excuse valable, et fut donc contraint de dire la vérité. Cependant, Luna l’accepta mieux qu’il ne l’aurait imaginé.
-Ce n’est que ça, j’ai cru que c’était quelque chose de plus grave comme une jambe cassée dehors, ou bien une subite envie de nous quitter.
Lorsqu’il arriva dans la salle, toutes les conversations cessèrent d’un seul coup. Hélios s’avança alors lentement et majestueusement à travers les convives pour rejoindre sa place sur le trône. Au passage, il remarqua que personne n’avait encore touché aux plats disposés là. Cynthia ne savait plus où se mettre mais il lui fit signe de l’accompagner. Une fois en haut, il prit la parole.
-Je vous souhaite à tous la bienvenue en ces murs. J’espère que vous passerez un bon moment ici en ce jour de fête du trente et un décembre, mais surtout que chacun puisse être heureux et garder un souvenir inoubliable de cette rencontre ! Nous devons rester forts et soudés, la guerre n’est pas finie, mais je veux que celle-ci ne vous empêche pas de vous détendre et d’oublier vos problèmes au moins un jour dans l’année ! Sans plus attendre, commençons ensemble ce festin et ensuite, nous nous réuniront sur les remparts pour un spectacle un peu spécial ! Sur ce, bonne soirée à tous !
Sa déclaration fut suivie d’un tonnerre d’applaudissements. Les conversations reprirent ensuite. Beaucoup étaient intrigués par la présence de cette petite aux côtés d’Hélios, mais il répondait simplement par « amusez-vous, vous aurez tout le temps de savoir plus tard »
La soirée se prolongea, tous les visages étaient rayonnants de bonheur, aussi bien les riches que les plus pauvres. Hélios faisait le tour des tables, discutant avec les invités, plaisantant avec eux, riant. Tout se passait parfaitement, à une exception près : il gardait toujours précieusement dans sa poche le collier, il attendait le bon moment pour le donner à Célestia, mais celle-ci était invisible parmi la foule. Luna était là, c’était la première fois qu’Hélios voyait un sourire sur ses lèvres depuis longtemps. Elle semblait si détendue, comme si la guerre n’était qu’un lointain souvenir.
Enfin arriva l’heure de monter sur les remparts. Il n’y avait pas beaucoup de place pour accueillir une telle foule, mais personne ne s’en plaignit. Hélios se fondait dans la masse, comme un simple citoyen. Il repéra Célestia un peu plus loin et se hâta d’aller la rejoindre, confiant sa protégée à sa sœur.
-Te voilà enfin Hélios, je tenais à te dire que ce que tu as fait ce soir est allé au-delà de mes espérances, c’est du bon travail.
-C’est grâce à toi, si tu n’avais pas été là, je n’aurai jamais pu organiser un tel spectacle.
Hélios sortit alors le collier de sa poche. C’était le bon moment. Au loin, une explosion de lumière illumina le ciel.
-C’était donc ça que tu nous réservais pour la fin…Dit Célestia émerveillée.
Les dragons hiératiques lançaient des rayons de lumière colorés qui explosaient en millier d’éclats une fois haut dans le ciel. Il ne s’attendait vraiment pas à voir cela, qui aurait cru qu’un jour, ces dragons se rendraient utiles.
Célestia baissa alors les yeux et aperçut le présent qui lui était destiné. Hélios lui tendit aussitôt, pris au dépourvu.
—————————————————————————————————————————————————-je vous la remets au cas ou
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-Je…c’est pour toi ; bafouilla-t-il en lui montrant le collier. Je voulais vraiment que toi aussi tu puisses te souvenir éternellement de ce jour…
-Ce n’était pas la peine, te voir te donner tant de mal simplement pour le bonheur des autres m’aurait suffi, mais je suis touchée que tu aies pensé à moi en particulier.
Elle enfila le collier qui brilla à la faible lumière de la lune. Les flocons autour continuaient de tomber, toujours aussi beaux tandis que les feux des dragons illuminaient toujours le ciel noir.
-Je peux savoir à quoi tu penses Hélios ? Lui dit une voix dans sa tête, tu étais sensé exterminer ces dragons, pas t’amuser avec !
-Tais-toi un peu Gariatron ; lui répondit mentalement Hélios. Je ne suis pas d’humeur à me battre avec toi aujourd’hui.
-C…Comment ? S’écria-t-il, je te rappelle que sans moi tu n’es rien et que c’est…
Il rompit instantanément le lien mental qui les unissait. Maintenant, tout était parfait, Hélios n’aurait pas pu rêver d’un plus beau jour. Il aurait aimé que chaque jour de l’année soit comme celui-ci, mais il savait aussi que c’était impossible. Il se tourna vers Célestia, elle était vraiment magnifique avec sa robe de satin, elle avait laissé ses cheveux au naturel pour une fois, mais cela ne faisait que ressortir encore plus leur beauté.
-Merci Célestia, merci pour tout ce que tu as fait pour moi ; pensait-il sans oser le lui dire.
Au loin, l’orchestre se mit à jouer sans qu’Hélios n’ait rien demandé, mais cela lui convenait, une fête sans musique ne pouvait pas être réussie. C’était un air à la fois doux et mélodieux, mais aussi d’une incroyable beauté. Cela résonna dans le cœur d’Hélios, éloignant pour quelque temps les ténèbres qui y grandissaient lentement.
Luna observait son frère de loin, elle semblait heureuse qu’il ait pu trouver enfin un moment de tranquillité malgré ses responsabilités.
La soirée allait bientôt se terminer, mais Hélios ne bougeait pas de sa place, il était comme figé par le froid. Il contemplait les derniers flocons de neige qui se faisaient de plus en plus rares dans la nuit, sous l’œil attentif de Luna et le regard bienveillant de Célestia.